[PP-discussions] "ça sert à rien" et le paradoxe du vote
Fabien Abbadie
fabbad at node97.com
Sam 27 Déc 02:51:02 CET 2014
C’est moins une manière de communiquer que de s’interroger sur les raisons du vote, sur ce qui motive les gens même dans des situations où de toute évidence l’action individuelle pèse peu.
La conclusion me semble surtout une évidence que seul un économiste pourrait ne pas voir : on vote moins en tant qu’individu isolé (l’”agent rationnel” des économistes) qu’en tant qu’expression d’un collectif. Il faut se sentir citoyen à part entière participant à la vie de la Cité ou engagé dans un groupe pouvant changer les choses. A un 2nd tour de présidentielle, une voix individuelle représente 1/43 millions de l’électorat mais 1/2 si on vote en tant que “être-de-gauche” ou “être-de-droite”, qu’on s’identifie à ces catégories/collectifs.
C’est pour ça que la participation en 2002 n’a pas faibli au 2nd tour alors que LePen n’avait aucune chance et qu’elle a été minable aux Européennes dans un contexte où à gauche comme à droite on parle de souveraineté nationale, où on dénie le pouvoir du Parlement et n’entretient ni l’esprit citoyen ni l’esprit partisan. Le FN n’a pas réuni plus de voix mais il a fait le plein de ses voix, il a mobilisé là où les autres partis n’ont rien stimulé, et, à mon sens, il a réussi parce que faire un bon score était d’emblée un geste politique fort pour l’électeur FN. Ils s’en moquent un peu de produire quelque chose, ils veulent juste signaler qu’ils sont là, la victoire est d’emblée dans le résultat électoral, pas dans le travail des parlementaires.
Tout ça peut être un problème particulier pour le PP dont la base électorale doit avoir un profil psycho-sociologique plutôt individualiste, des tendances anarchisantes se défiant des institutions donc du vote, des difficultés à s’identifier à une action collective d’ampleur dépassant le cercle des relations de confiance (et de manière plus “micro-politique” ça peut aussi donner quelques indices sur les manières dont ça a voté à l’AG...).
En fait, c’est le genre de truc que je dois prendre en compte pour mon projet d’Assemblée (Nationale) Pirate : mettre en évidence la constitution de collectifs libres et fluides, qu’on ne soit pas enfermé dans des parti/groupes/sections définis à l’avance mais qu’on voit malgré tout qu’on ne vote pas que pour soi, tout seul, qu’en fait on agit avec une multitude, on fait avancer une force collective.
From: Mistral Oz
Sent: Friday, December 26, 2014 8:47 PM
To: Fabien Abbadie
Cc: ML Discussions
Subject: Re: [PP-discussions] "ça sert à rien" et le paradoxe du vote
> p représente la probabilité que sa voix fasse basculer l’élection (...) Comme p est proche de zéro
C'est pas tout à fait vrai. Sur beaucoup d'élections locales, le nombre d'électeurs votants tourne autour de 30 000. C'est beaucoup, mais c'est très loin d'être écrasant. Chaque voix peut vraiment être déterminante, en particulier pour les partis qui ne sont pas favoris dans la course.
Bref, c'est aussi une mauvaise manière de communiquer sur la politique que de dire aux électeurs qu'ils ne peuvent pas agir à moins d'être une masse très significative. Avec très peu de militants engagés, il est possible de promouvoir certaines décisions et c'est très bien comme ça.
Mistral Oz
Parti Pirate
Co-coordinateur Bretagne - Membre SI Diversité
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De: "Fabien Abbadie" <fabbad at node97.com>
À: "ML Discussions" <discussions at lists.partipirate.org>
Envoyé: Vendredi 26 Décembre 2014 13:19:07
Objet: [PP-discussions] "ça sert à rien" et le paradoxe du vote
Ci-dessous un article s'interrogeant sur le pourquoi des votes : "Le vote étant le mode d’exercice par excellence de la participation politique, les citoyens témoignent en allant voter de leur attachement à la démocratie. Voter serait alors un acte de communion civique".
Les Pirates se sentent-ils citoyens ? démocrates ? républicains ?
http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/schumaines/ses/Documents/Leparadoxeduvote.htm
Extrait :
Le paradoxe du vote est bien illustré par le modèle de l'électeur rationnel d'Anthony Downs. Dans ce modèle, le gain net attendu de la participation (l’incitation à voter) est égal à pB - C, où p représente la probabilité que sa voix fasse basculer l’élection et B le bénéfice net escompté par l’électeur (...) Comme p est proche de zéro, le bénéfice espéré du vote est également proche de zéro, et définitivement inférieur à C, le coût de la participation. D’où la prédiction: "un individu rationnel devrait s'abstenir de voter." Et pourtant les gens votent…
(...) une étude suisse ( cf trad. de “Pourquoi voter ? Stephen J. Dubner et Steven D. Levitt, New York Times, 6 Nov. 2005”, .doc ) donne à penser que les gens votent pour qu’on les voit voter ! (...)
Mais cette découverte n’épuise pas le sujet, loin s’en faut. Pour comprendre pourquoi les gens votent, il faut chercher aussi du côté des valeurs, de la rationalité axiologique. Si les gens votent, nous dit Raymond Boudon (Revue française de sociologie, 1997, 217-227, .doc ), c'est tout simplement parce qu’ils sont attachés à la démocratie. Le vote étant le mode d’exercice par excellence de la participation politique, les citoyens témoignent en allant voter de leur attachement à la démocratie. Voter serait alors un acte de communion civique.
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